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La politique française et européenne en matière de soutien au jeu vidéo

Assemblée nationale - XIVe législature - Session ordinaire de 2012-2013


Première séance du mardi 27 novembre 2012
Présidence de M. Christophe Sirugue

Soutien au secteur du jeu vidéo

M. le président

La parole est à M. Patrice Martin-Lalande, pour exposer sa question, n° 22, relative au soutien au secteur du jeu vidéo.

Patrice Martin Lalande (Député de la 2ème circonscription de Loir-et-Cher)M. Patrice Martin-Lalande

Madame la ministre déléguée chargée des petites et moyennes entreprises, de l'innovation et de l'économie numérique, ma question porte sur la politique française et européenne en matière de soutien au jeu vidéo. La France est mondialement reconnue comme un des pays les plus créatifs en matière de jeu vidéo. Malgré cet atout exceptionnel, elle subit une véritable hémorragie des activités et des emplois, au bénéfice notamment du Canada, qui a su instaurer un système de soutien particulièrement favorable. Le Québec a ainsi mis en place depuis une quinzaine d'années un très efficace crédit d'impôt sur les salaires de R&D, d'un taux initial de 50 %, rabaissé en 2003 à 37,5 % - excusez du peu -, mais qui pourrait prochainement être rehaussé. À ce crédit d'impôt provincial s'ajoute un crédit d'impôt fédéral de 17 % sur les salaires et autres dépenses éligibles. Ces aides, renouvelées annuellement permettent ainsi aux entreprises d'octroyer à leurs employés des salaires attractifs, de 10 à 15 % supérieurs aux salaires français.

Lors d'un déplacement au Québec il y a quelques semaines, j'ai pu moi-même constater que les différentes aides, non limitées dans le temps, offertes par les gouvernements provincial et fédéral - s'en parler de l'aide apportée par la ville de Montréal - ont été déterminantes pour l'implantation des sociétés étrangères développeuses de jeux vidéo.

Si la France et l'Union européenne ne prennent pas d'urgence des mesures de soutien de même niveau, elles risquent de perdre définitivement la place de premier plan que leurs talents créatifs devraient leur assurer dans l'industrie mondiale du jeu vidéo. Il faut dire clairement si nous voulons ou non réaliser d'urgence cette mise à niveau. Ne pas le faire reviendrait à renoncer à la localisation en Europe des emplois pour la création de jeux vidéo.

Au moment où se profile l'arrivée d'une nouvelle génération de consoles de jeu vidéo et où se développent dans des conditions économiques très différentes les jeux vidéo en ligne et sur mobile, quelles initiatives le Gouvernement compte-t-il prendre pour mettre fin à l'hémorragie d'emplois et créer en France et en Europe des conditions d'accueil comparables à celles du Canada et de quelques autres pays qui nous concurrencent durement ? Plus précisément, le Gouvernement a-t-il l'intention de faire évoluer, dans le sens d'une mise à niveau international bien nécessaire, le crédit d'impôt jeu vidéo au plan français comme au plan européen, crédit d'impôt qui a déjà donné des résultats encourageants ?

M. le président

La parole est à Mme la ministre déléguée auprès du ministre du redressement productif, chargée des petites et moyennes entreprises, de l'innovation et de l'économie numérique.

Mme Fleur Pellerin, ministre déléguée chargée des petites et moyennes entreprises, de l'innovation et de l'économie numérique

Monsieur le député, vous avez souhaité attirer l'attention du Gouvernement sur la politique de soutien au jeu vidéo. C'est en effet un sujet majeur, parce que la France est un des grands pays du jeu vidéo, avec des éditeurs aux premières places mondiales comme Vivendi-Activision, Ubisoft ou Gameloft, et un tissu de près de 330 PME innovantes. Deuxième marché européen derrière le Royaume-Uni, la France représente 3,2 milliards de chiffre d'affaires en 2011, 26 % étant issu des jeux vidéo en ligne et sur mobile. Près d'un foyer sur deux est équipé d'une console, et l'on estime que 43 % de la population joue. La France est ainsi bien positionnée pour demeurer un terreau extrêmement favorable aux activités de jeu vidéo.

Les prochaines innovations technologiques dans le jeu vidéo, liées aux nouvelles interfaces, aux réseaux sociaux, à la distribution numérique, à la mobilité, au serious game et à la 3D, représentent autant d'opportunités pour consolider l'industrie en France, réaffirmer sur le plan international notre savoir-faire, la French touch, et notre capacité à innover et à attirer les investissements.

Mais vous avez raison, nous sommes dans une compétition mondiale, et d'autres régions telles que le Québec, l'Irlande ou le Sud-est asiatique mettent en place des mécanismes de forte incitation fiscale pour attirer sur leur territoire les activités de développement de jeux vidéo.

Face à cela, le Gouvernement agit dans deux directions. Il cherche d'abord à consolider le dispositif du crédit d'impôt en faveur de la production de jeux vidéo. Mise en place en 2008, cette mesure a permis de soutenir 94 projets pour un budget global de 330 millions d'euros et un crédit d'impôt de 46 millions d'euros, soit un bilan extrêmement encourageant.

Ce dispositif bénéficiait d'un agrément de la Commission européenne pour une période limitée, jusqu'à la fin de l'année 2011. Les autorités françaises se sont donc attachées à consolider le dispositif, en procédant à une nouvelle notification de ce crédit d'impôt auprès des autorités européennes. Le Gouvernement français a ainsi récemment obtenu l'accord des instances européennes, et le mécanisme français du crédit d'impôt en faveur du jeu vidéo est aujourd'hui reconduit pour une nouvelle période de six ans.

M. Patrice Martin-Lalande

Très bonne nouvelle !

Mme Fleur Pellerin, ministre déléguée

Le Gouvernement entend également agir de concert avec nos partenaires européens. À ce jour, la France est le seul pays en Europe à disposer d'un tel mécanisme d'incitation fiscale en faveur du secteur du jeu vidéo. Il s'agit de mobiliser nos partenaires européens, afin de pouvoir faire évoluer notre action fiscale et de l'optimiser.

Au niveau européen, la situation semble évoluer favorablement : fin 2011, le Gouvernement irlandais a annoncé un large plan de soutien au secteur ; le Gouvernement britannique a annoncé la mise en place d'un dispositif similaire au crédit d'impôt dès la rentrée 2013.

Ces éléments devraient contribuer à mettre la Commission européenne dans de meilleures dispositions par rapport aux dispositifs de soutien au secteur, tant sur les questions de distorsion de concurrence que de l'assimilation du jeu vidéo à un bien culturel.

M. le président

La parole est à M. Patrice Martin-Lalande.

M. Patrice Martin-Lalande

Merci, madame la ministre, de cette réponse très complète et plutôt encourageante. Je me permets simplement d'insister ici, car l'avenir du jeu vidéo en France et en Europe nous tient à cœur, sur le fait que, malgré le crédit d'impôt que j'ai contribué à faire adopter par le Parlement il y a cinq ou six ans, l'hémorragie et les délocalisations ont eu lieu.

Si la reconduction du crédit d'impôt en faveur des jeux vidéo est une bonne nouvelle, dont je remercie le Gouvernement et la Commission européenne, elle n'est pas suffisante pour rétablir aux yeux des entreprises l'équilibre entre les avantages que propose la France et ceux des autres pays, notamment le Canada. Il faut donc aller plus loin et adapter, comme j'avais essayé de le faire il y a deux ans, le crédit d'impôt pour les jeux vidéo aux nouvelles formes de production, notamment le jeu en ligne, qui implique des durées beaucoup plus longues. Il y a urgence à aller plus loin, madame la ministre, si nous voulons que l'Europe et la France conservent leur place dans ce secteur innovant.

Notes et références

Compte rendu intégral : www.assemblee-nationale.fr/14/cri/2012-2013/20130074.asp

Publié le 26 février 2013 par Emmanuel Forsans
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